samedi 24 avril 2010

Gros con soit qui mal y pense.

Ah oui, bien sûr, je suis distrait. J’oubliai : tout ceci est de la fiction pure et douce. Toute ressemblance avec des éléments de la vraie vie serait le fruit d’une coïncidence que je serais bien en peine de m’expliquer. C’est vu ?

Toute personne assez bête pour déceler une ressemblance entre les personnages ou écoles d’ingénieurs citées dans ce blog et des personnages ou écoles d’ingénieurs réelles dévoilerait au monde entier sa perversité et son esprit tordu. Autant s’éviter ça, non ? Franchement ! Ce serait vraiment crétin. Et y en a marre de la crétinerie !

Voilà pour le laïus indispensable. Ça peut paraître superflu, mais je sais qu’il y a des esprits chagrins en vadrouille sur la toile, à l’affut (tu n’as rien de mieux à faire, sans rire ? au boulot ! grosse feignasse !)

Cette précision étant faite, vous pouvez vous délecter de mes aventures.
San A

vendredi 23 avril 2010

San-Antonio à l'Isara : quatrième de couverture

San-Antonio à l'Isara : Que chacun y mette du sein !

A qui fait-on appel quand les cadavres tombent comme des mouches dans le girond d’une école d’ingénieurs lyonnaise, l’Isara ? Réponse : pas à moi ! Le commissaire divisionnaire Deboeuf, de la criminelle à Lyon, fera bien l’affaire.

Penses-tu : ces cadavres n’ont, parait-il, rien à voir les uns avec les autres. Des petits meurtres. Des petites affaires que la coïncidence centralise au même endroit. De la gnognotte pour petits inspecteurs de police, ça !

Sauf que je ne m’en laisse pas compter. Une coïncidence ? Mes fesses ! C’est tordu, c’est caché, c’est labyrinthique, mais l’ensemble fait bel et bien partie d’une même enquête. Dans laquelle je me lance à corps et à collègues perdus : Jéjé, Pinaud, Béru ? Momentanément absents !

Va donc falloir que je mouille le maillot avec les allié(e)s rencontré(e)s sur place. Et que chacun y mette du sein !

mardi 13 avril 2010

San-Antonio à l'Isara : Epilogue - seconde partie

Où je récapitule pour pas que les lecteurs capitulent

Il est content de me dépasser dans la réflexion, le Dabe. La supériorité de la tête pensante de la police sur les hommes de terrain, ça lui donne des frissons dans les testicouilles. Il suggère :
- Imaginons que je m’appelle Jean Simon. Ou non, plutôt… oui, disons Victor… Hugo. Oui voilà, c’est très bien. Victor Hugo. Vous y êtes ?
- J’y suis, monsieur le directeur !
- Moi, Victor Hugo, je subtilise plusieurs centaines de kilogrammes de drogue à l’Isara. Peu de temps après, trois personnes liées à l'Isara, ayant un prénom pour nom de famille sont tuées. Le fait que les meurtres soient exécutés en modes divers et variés perturbe alors sans doute les forces de l’ordre. Le fait que trois autres victimes aient un patronyme normal également. Mais moi, le coupable, je me méfie ! Je fais le lien ! Je me protège ! Je m’enfuis !
- Permettez un petit compliment, monsieur Victor Hugo ?
- Plait-il ?
- Vous êtes un génie ! Passez moi la familiarité, je ne trouve pas d’autres mots. Evidemment, si le vrai coupable n’était pas dans les premiers interrogés, il devait nécessairement s’inquiéter à l’écoute des actualités.
- Evidemment ! Nécessairement ! répète Achille d’un air entendu.
- Mais cela faisait partie du plan de Durêve. Les dix suspects aux deux noms étaient surveillés depuis le début. Durêve avait posté des guetteurs. La stratégie était bonne : en tuant les suspects déjà interrogés, Durêve appâte la brigade criminelle et pas celle des stups. Ce qui lui assure une certaine discrétion, car même s’ils se font attraper, aucun de ses meurtriers ne sait que tout tourne autour d’une affaire de came. Mais surtout, ces meurtres, pense-t-il, vont forcer le vrai coupable à se démasquer. En fuyant, en se protégeant, que sais-je? comme vous le suggériez.
- Mais Durêve ne surveillait pas les bonnes personnes... il eut fallu qu'il surveillasse son propre demi-frère ! s’emballe Achille. Et, logiqement, aucun des suspects ne s’est trahi…
- Ce qui a plongé Durêve et Leton dans une situation délicate. Les suspects Pierre Charles, Cécile Baptiste et Fabien Henri : questionnés sans succès. Les innocents Jean-Noël Gigonnade, Benjamin Pointe, Jean-Jean Belleride : tués pour la diversion. L’auxiliaire Jeannot Reliure et sa fiancée Jeannette : sacrifiés. Au bout de onze cadavres, toujours pas de mouvement parmi les trois suspects restant !
- La marge de manoeuvre se réduisait ! triomphe le Vieux comme s'il y était.
- Et oui ! C'est pourquoi, avant de s’en prendre aux derniers suspects, Durêve a souhaité explorer une nouvelle piste…
- Laquelle ? demande le Tondu.
- Inutile de faire semblant, monsieur le directeur. Votre modestie vous honore, mais je sais que vous avez deviné.
- Humpf, oui,naturellement, non, je vous en prie, continuez, marmonne Achille.
- Durêve m’a vu près de la troisième victime, à Paris. Il s’est renseigné sur moi, et s’est rendu compte que j’avais, par le passé, montré une certaine aptitude à la résolution d’enquête, si vous me permettez la formule. Il m’a même cru un peu plus rapide que je ne le suis, et a pensé que j’avais déjà le voleur en tête, ou a minima un certain nombre d’éléments à lui apporter. Il a donc capturé un de mes amis dans le but de me faire parler, et m’a donné rendez-vous à l’Isara. But de la manoeuvre : en savoir plus sur son voleur sans avoir à culbuter un ou deux innocents de plus.

Le vieux se lève, fait quelques pas, se rassoit. Il est comme les tennismen qui avant chaque service, font rebondir la balle, toujours le même nombre de fois sans même s’en rendre compte. C’est leur tic à eux. Le sien, c’est de lever, balader, puis rasseoir son triste cul avant les échanges verbaux.
- Pourquoi là ? demande-t-il finalement. Paulo ayant disparu, l'Isara n'était plus aussi accueillant pour ces canailles.
- Certes ! Ils ont du gazer le veilleur remplaçant de Paulo. Mais Leton, à force de travailler la nuit à l'Isara, avait pris ses repères. Et puis l’école est située dans une zone de bureaux, très tranquille la nuit en cas de grabuge. Enfin, puisque cette aventure s’intitule « San-Antonio à l’Isara », il faut bien rentabiliser le titre…
- Admettons. Vous vous rendez donc sur place en avance. Vous déjouez le piège, élucidez l’affaire, puis échappez aux hommes de Pozzi qui a, de son côté et par des voix différentes, également tiré l’histoire au clair. Polo, Durêve et Uduku y laissent la vie. Quant à Leton ?
- Il a été touché à la jambe lors de la première fusillade. Par erreur, sans doute : Pozzi, comme Durêve, souhaitait le garder sous sa coupe : ce chimiste représentait à leurs yeux une corne d’abondance formidable ! Sans connaissance, il a été oublié par nous autres sur place, et probablement considéré comme mort par les hommes de Pozzi qui sont arrivés par la suite. Il est actuellement à l’hôpital Sain-Luc-Saint-Joseph de Lyon. Cette histoire l’a calmé (et non pas camé) : il arrête la drogue et même la chimie. Il a décidé de se mettre à la musique.
- Bien. C'est une vocation plus saine.
Le Dabe, je sais qu'en terme de musique, il est plutôt piano que guitare. Mais il est surtout plutôt science que musique. Mathias m'a dit que le vieux avait rapidement et discrètement essayé d'enrôler Leton dans l'équipe de la police scientifique. Pas fou, le Vioque ! Il a beau chiquer les innocents, je me doute bien qu'il en sait plus que ce qu'il dit. Changement de sujet de la part de Chichille :
- Reste le cas Pozzi. Il est, si mes informations sont bonnes, lui aussi à l’hôpital Saint-Luc-Saint-Joseph, en réanimation. Exact ?

Refroidissement soudain ! Tout récapituler en léchant les fesses du Vieux n’a visiblement pas suffi à le dérider complètement. Le cas Pozzi-Béru le chiffone, il a retrouvé sa gueule d’enterrement. Et pas n’importe quel enterrement : le sien !
- Ecoutez, San-Antonio, solennelise-t-il. Que Blanc, Pinaud et Bérurier aient participé à cette mission sans être assermentés est un problème mineur au regard de l’aide qu’ils vous ont apportée. Mais que ce dernier… fasse… ce qu’il a fait… et dans un lieu public, de surcroit…
- Je ne peux que répéter : nous lui devons d’avoir récupéré la drogue, plus des aveux dans bien d’autres affaires.
- Mais, pour commencer, que faisait-il sur le toit de cette auto ? s’emporte le Dabe.

C'est vrai, à la fin ! Qu'est-ce que le Gros faisait là-haut? Question que je me suis longuement posée... J'explique :
- Pourchassés par les gorilles de Pozzi, nous avons fui l’Isara à six à bord d’une Austin Mini, monsieur le directeur. Cinq à l’intérieur, Bérurier sur le toit. Quand Pozzi nous a dérobé le véhicule, Bérurier était toujours allongé dessus.
- Pourquoi diable n’en est-il pas descendu quand vous vous êtes arrêté ?
- Il s’est endormi, monsieur le directeur.
- Vous plaisantez !

Et non, je ne plaisante pas ! Sa Majestée n’était pas blessée, mais elle s’était simplement endormie sur le toit de la Mini. Pozzi, qui s’est précipité vers la tire en défouraillant sur moi, ne s’en est pas rendu compte. Comprenant que ça allait rapidement barder pour son matricule et qu’il n’avait plus rien à espérer à Lyon, le napolitain mis les adjas, direction : l’autoroute de Turin.

C'est sur une aire d’autoroute, alors qu’il comptait changer de guinde pour éviter les barrages que nous avions fait mettre en place un peu partout avec le signalement de la Mini, que Pozzi a malencontreusement refermé sa portière sur le doigt de l’Hénaurme.

Grosse surprise de Pozzi, grosse rogne du majestueux. Qui commence à tabasser le nain. Découvrant en cours de route qu’il a affaire à Pozzi en personne (dont je lui avais parlé mais qu’il n’avait jamais vu), le Dodu prends l’initiative de donner une tournure interrogative au passage à tabac. Pozzi est un dur : il se tait. Béru sort alors l’artillerie lourde. Les vacanciers en transit sur cette aire d’autoroute perdue de Savoie ont la stupeur de voir le gros, cul nu et pointé à quelques centimètres du naze de Pozzi, poser des questions et loufer quand les réponses ne lui conviennent pas.

Certains essayent bien de s’interposer. Un savoyard courageux s’évanouit en s’approchant un peu trop près des effluves (un Savoyard pourtant !). Un touriste anglais menace, à distance, d’appeler la police, ce à quoi Béru répond en tendant sa brême « Aïe âme oine Flicman maille self, sœur ! ». Convain-cul (poilu et malodorant), le rosbif (heureusement Italophone) va jusqu’à prendre en note les aveux exhaustifs de Pozzi qui, asphyxié, en perd son français. Les notes du rosbif nous permettent de clore l’affaire proprement. Hélas, la méthode, exhibée au grand public, déplait au Chauve.
- Bien, San-Antonio, décrète-t-il, solennel. Merci d’être venu, je vais aviser.

Je mate Achille en me levant. Et décèle un minuscule, ténu, tout petit, rabougri, fripé, piètre, dérisoire et insignifiant bout de sourire à la commissure (de police) droite de ses lèvres. C’est gagné ! Le gros n’aura pas d’ennui. C’est l’effet-prout. Tordu, quand on y pense ! Craquer une louise devrait être aussi normal que respirer ou avoir les cheveux qui poussent. Mais non, non ! Certains, parmi la race prétendument la plus évoluée sur terre, ont réussi à faire de la loufe un élément de gêne. Et, fort heureusement, de rire ! Le Tondu ne fait pas exception et bizarrement, l’équilibre semble pencher du côté de la poilade.

La nouvelle assistante du Vieux me raccompagne jusqu’à la porte. Elle a l’air coquin, tiens, dans sa robe sombre. Je gage que le Dabe la satisfait mal, la pauvre bichette. Elle me semble mériter un chibre tonique, cette petite. Après qu’un minable ait dérobé pour une fortune de drogue, j’estime avoir le droit, moi, de dérober cette gerce. De la déchausser, de la déculotter, de la désoutiengorger.

Je sors d’une nuit blanche, je suis un brin fatigué : va donc falloir qu’elle y mette du sein !

vendredi 9 avril 2010

San-Antonio à l'Isara : Epilogue - première partie

Où je récapitule pour pas que les lecteurs capitulent

Je regarde parfois des choses qui ne me regardent pas. C’est ce qui fait de moi un enquêteur hors-paire. Le Scalpé du bulbe... pardon : Achille Hachille, le directeur de la police, le sait bien, et il me passe volontiers mes initiatives un peu tsoin-tsoin quand (je devrais dire « car ») elles sont couronnées de succès. Pour une raison qui m’échappe et qui me pèse (qui m’est chape !), il a moins de facilité avec les libertés que peut prendre Béru.

Le Vieux caresse son bureau avec ses long salsifis. Il se recoiffe une mèche qui n’existe plus depuis des lustres. Me regarde. S’apprête à bonnir un discours que je n’ai pas envie d’entendre. Pour pas t’emmerder pendant une conversation, ouvre ta gueule, comme disait je sais plus qui. J’interviens donc :
- J'insiste sur le fait que la démarche de Bérurier nous a permis de mettre la main sur le stock d’Héroïne que Pozzi s’était approprié. Et d’élucider une demi-douzaine d’affaires mal classées dans lesquelles l’Italien trempait de la tête et des épaules.
- J’entends bien ! s’exclame sèchement Peau-de-Fesse. Mais vous le savez, San-Antonio. La fin ne justifie pas toujours les moyens. Surtout certains moyens ! Ce qu'a fait Bérurier...

Il se lève, fait un tour de son bureau, se rassoit. Je sens bien qu’il a envie de passer l’éponge, Achille. Mais ça ne lui est pas facile. Il va falloir que je l’aide à noyer le poisson.
- Reprenons le tout du départ, suggère-t-il. Je n’ai, après tout, pas suivi cette affaire de près. Hier midi, vous me demandez l'autorisation de prendre en charge l'affaire... 24 heures et quelques morts violentes plus tard, on m'apprend sans aucune forme de détail que Bérurier s'est rendu coupable de... de... hum.

Certains mots refusent de sortir de certaines bouches. Le Vieux n'a pas l'intention de se faire violence pour dire "prout", "zigounette" ou "augmentation salariale". Il enchaîne :
- Hum ! Parlez-moi de Joss Leton.
- Joss Leton était un chimiste jeune et brillant, monsieur le directeur. Mais instable. Il a mis sa science au service de la Maffia italienne. Dans un mauvais labo, il produisait de l’héroïne basse qualité pour le compte de Pozzi. Mais ce travail ne lui convenait pas : il se sentait capable de créer une dope bien plus élaborée, à condition d’avoir un matériel plus moderne.
- Un beau jour, intervient le Scalpé Suprême, son frère lui apprend que ces moyens sont accessibles à l’Isara, l’école pour laquelle il est garde de nuit. Juste ?

Il biche toujours quand il a l’impression de tout deviner, le Vioque. Je suis là pour l’adoucir : je décide donc de le caresser dans le sens du non-poil.
- Parfaitement, monsieur le directeur ! je m’enthousiasme. Walter Paulo, qui n’est en réalité que son demi-frère, lui suggère ceci : commencer ses travaux de recherche, puis les mettre en application à l’Isara, toutes les nuit où lui, Paulo, est de garde.
- Ce que Leton accepte, je parie !
- Vous avez tout bon, monsieur le directeur. Leton est un fortiche : il trouve rapidement la formule qui lui permet, à partir du pavot fourni par Pozzi, de continuer sa camelote pour le Napolitain tout en produisant son héroïne parfaite en parallèle. En plusieurs mois, 250kg de poudre sont dissimulés dans un faux plafond de l’Isara. Seulement voilà : au moment où Leton prévoit de commencer la commercialisation de son produit…
- Ne dites rien ! s’exclame le Tondu. Le stock disparait ! C’est cela ?

Mes yeux ronds et ma bouche béante terminent de convaincre le Dabe qu’il est loin devant Sherlock dans la hiérarchie des cadors de la déduction.
- Et je mettrais bien une pièce sur l’identité du voleur, ajoute-t-il, son long index inquisiteur pointé vers moi. C’est Walter Paulo qui a fait le coup !
- Comment l’avez-vous deviné ?
- Une inspiration, affirme le Vieux avec une modestie aussi fausse que je suis sceptique.
- C’est prodigieux, cette inspiration ! Paulo, en effet, se fait la malle avec les 250kg. Etant seul àl’Isara dans l'exercice deses fonctions, il a facilement pu réaliser l’opération en toute discrétion une nuit où Joss ne produisait pas. Le lendemain, il contacte son demi-frère, catastrophé, et joue le complice accablé : « quelqu’un s’est emparé de notre butin ! ». Paulo rassure Leton : tout le personnel de l’Isara, les élèves, les profs et tout ce qu’on peut trouver dans une école (la liste est plus longue et plus étonnante qu’il n’y parait ! mais baste, le temps me manque pour développer ce point), est soumis à un système de badge. Il va facilement trouver qui s’est introduit un nombre suffisant de fois dans la cache pour la vider.
- Alors ! s’écrie le Vieux en fermant les yeux et avec l’air de produire une réflexion intense. Alors… alors… il lance son demi-frère sur une fausse piste…
- Si vous ne m’avez jamais vu bluffé, monsieur le Directeur, profitez-en. Car vous avez mis dans le mille ! Paulo réussit en une seule ruse à : donner à son frère un indice bidon sur le coupable, qui aurait un prénom pour patronyme ; disparaitre sans laisser d’adresse en prétextant qu’il s’est trop mouillé ; faire en sorte que Leton ne puisse plus avoir accès aux relevés des badgeuses. Leton est désemparé ! Il fait alors appel Yvan Durêve, un embobineur de première. J’ignore comment ils se connaissaient, mais en tout cas, Durêve accepte de marcher dans la combine de Leton. Il commence par contacter Paul Uduku, un étudiant de l’Isara, pour obtenir une liste des doubles-prénoms. Le gosse tape dans l’annuaire de l’école et liste les personnes concernées. Elles sont au nombre de dix. Durêve déploie une armée de malfrats pas chers pour pister ces dix suspects. Dans le lot, quatre ont des alibis en béton armé pour la période du vol.
- Mais les six autres, non ! Et c’est à eux, j’en mettrais ma main au feu, que Durêve s’en est pris.

Je me retourne. Je tourne ma tête dans tous les sens, comme si je cherchais quelque chose dans la pièce.
- Tout va bien, San-Antonio ? s'inquiète le bientôt gâteux.
- Vous m’avez piégé, monsieur le Directeur ? je demande. Où est la caméra !
- Pardon ?
- Vous avez lu tout le dossier ! Et vous êtes en train de me filmer pour immortaliser mon ébahissement face à votre sagacité simulée.
- Mais grands Dieux non ! proteste-t-il. Je n’ai rien su de cette affaire, si ce n’est son dénouement. Je le jure !
- Alors comment expliquer le fait que vous en deviniez tous les rebondissements ? Car, oui, monsieur le directeur, c’est bien aux six autres suspects que Durêve s’en est pris ! Il les a interrogés, les uns après les autres.
- Et naturellement, ils ne savaient rien ! affirme le Dabe sur un ton péremptoire.
- Naturellement ! Par discrétion, Durêve a fait assassiner ceux qu’il a pu cuisiner. Comprenez : quand vous demandez à un inconnu s’il vous a dérobé une petite fortune en héroïne, vous n’avez pas intérêt à le laisser vivant derrière vous.
- Bien sûr que je comprends ! s’emporte le Vioque.
- Leslie Psales, une pro de la lame, Vatlav Elku, un Slovaque maniaque de la corde, et Jacek Enkula, un excité polonais de la gâchette, ont perpétré les trois premiers meurtres. Le Gang Rennais, un groupe de trois bricoleurs, était censé s’occuper de deux autres suspects. Nous avons retrouvé leurs références dans les affaires de Durêve. Pour brouiller un peu les pistes, notre barbu a également fait tuer trois innocents dans le laboratoire de Physique de l’école, via un pauvre bougre nommé Jeannot Reliure.
- Stop !

Le Vieux a levé sa grande paluche devant moi. Il a les sourcils aussi froncés que possible.
- Quelque chose me chiffonne.
- Quoi donc, monsieur le directeur ?
- Quelque chose qui cloche dans le plan de Durêve. Le voleur, s’il avait existé… constatant les assassinats, il aurait du se méfier, non ?
- Je ne suis pas sûr de vous suivre, affirmé-je alors que je vois clairement où il veut en venir –mais faut le faire mousser un maximum !

lundi 5 avril 2010

San-Antonio à l'Isara : Chapitre 21

« Une tire de volée » n’a que peu de choses à voir avec « une reprise sans contrôle »

Sur les indications de Mathias, j’allume le radar (oups ! excusez-moi : j’ai complètement inversé l’ordre des lettres… tuz !).
- Cap au Nord-Est ! je déclare, tel Cristophe Colomb, qui en son temps a du faire l'objet de certaines blagouze scatophiles, biscotte son blaze évoque quand même l'endroit où la crotte se forme.
- C’est normal de filer au nord quand on veut rentrer en Italie ? demande Eloi.
- Je pense que Pozzi s’éloigne simplement du merdier à l'Isara pour ne pas être sali si les volailles venaient à rappliquer pendant la fusillade, suggéré-je. Il a probablement donné un lieu de rendez-vous à ses sbires une fois le massacre terminé ?
- En tout cas, il conduit comme un manche ! remarque Jéjé qui d'où il est parvient à voir l'écran du radar. Il zigzague à profusion !

On pourrait ajouter qu’il ne va pas bien vite. Guidé par le gone, on prends les grands axes qui jalonnent le trajet de Pozzi. En quelques minutes, on a sa guinde en visuel. Une Lamborghini pas crade, grand format. Il est encore tôt, et les voitures ne sont pas légion dans la capitale des Gaules. Tant mieux pour Pozzi qui semble mal maîtriser son véhicule.
- Qu’est-ce qu’il branle ? demande Eloi. Il est ivre-saoul ou quoi ?
- Et non, gone, je m’exclame : il est nain ! Il a du laisser tous ses hommes sur place. Or, seul, il est incapable de conduire. Il doit à peine voir la route s’il veut atteindre les pédales…
- Vivement qu’on le serre, peste Jéjé.
- En attendant, c’est nous qui sommes serrés ! ajoute Pinuche en pouffant lamentablement.

Un instant, la Lamborghini est hors de vue (elle reste hors de prix) pour avoir tourné à un feu. Quand nous parvenons au carrefour, la luxueuse caisse est à l’abandon sur les voies de tramway qui contournent une grande place -"Grange Blanche", d'après le môme. Le Rouquin s’arrête à une distance raisonnable.
- Suite du programme ? demande Jéjé.
- ‘peut pas être loin, je réponds. On sort et on fouille la place…

Je peux te certifier qu’il ne nous faut bien une minute pour évacuer la Mini. On est tout plié, encastré, coincé les uns par et dans les autres. Jéjé, Pinaud et Eloi donnent l’impression de sortir de la même boîte de sardines. Les tâches d’huiles sur le veston de Pinaud accentuent l’idée.
- Gaffe, le drôle est sûrement armé, je préviens. Rouque, reste avec le gone, par prudence.

On investit la place. On aurait d’ailleurs mieux fait d’investir dans le capitale d’une fabrique de doudounes ! Il gèle à pipe fendre (car après tout, on peut rire de tout, même d’avoir froid), ici, et le fait de sortir à 5 de trois mètres cubes rend le contraste con et triste. Rien ne bouge. Où qu’il est, ce con de Pozzi ? Je pose ma fesse droite sur le siège conducteur de la Lamborghini pour mater le tableau de bord d’un peu plus près : les clés n’y sont plus. Serait-ce à dire que le nain Pozzi cherche à empêcher toute nouvelle poursuite ? Le nain a-t-il largué sa chiotte simplement parce qu’il n’arrivait pas à la conduire, ou bien parce qu’il nous a repérés ? Je penche pour la deuxième option. Sinon, explique moi pourquoi il aurait garé sa guinde aussi mal ? Voilà bien l'attitude d'un gonze qui n'a rien à se reprocher, tiens !

Un type a dit : « le meilleur moyen de ne pas mourir de vieillesse, c’est de mourir d’autre chose ». J’aimerais voir le gars en question se faire tirer dessus. Ce petit malin se rendrait compte, à coup sûr, que mourir de vieillesse n’est pas une si mauvaise idée que ça ! Une dragée vient exploser le rétro gauche de la Lamb’, une autre explose le rétro intérieur après avoir joué à la perforatrice avec le pare brise. Ainsi va des rétros, Satanas ! comme dirait Diabolo. Pan ! annonce encore un revolver pour le moment anonyme. Flûte ! me dis-je dans mon for intérieur. Flûte de pan ! conclue un chilien de passage.

Je me tasse –c’est un peu fort de café !- derrière le volant. D’autre coups de feu claquent ici où là, puis un bruit de moteur s’invite à la nouba. Bilan du feu d’artifesse ? Jéjé et Mathias s’élancent dans une brève course dans la direction que je devine être celle de l’Austin Mini qui s'éloigne. Pinaud, lui, court dans une toute autre direction derrière son couvre-chef qu’un courant d’air emporte. Le Rouillé et Jéjé abandonnent vite l’inéquitable poursuite.

- Pas de mal, patron ? demande Mathias.
- Pas plus que de femelles ! j’écrie. Qu’est-ce qui s’est passé ?
- Pozzi s’était planqué dans un buisson, explique Jéjé. Il s’est glissé jusqu’à la Mini pour la subtiliser, et il t’a canardé car tu étais le plus près de lui. Il t’a raté, heureusement : le temps qu’on réagisse, il avait déjà décampé.
- C’est ma chère Maman qui m’a raté, oui ! geins-je. Ce petit malin de Pozzi a pensé à emporter les clefs de son auto, lui, alors que j’ai bêtement laissé celle de la Mini sur le contact. Je suis le roi des ahuris, mégnace ! Sans parler de cette drôlesse de Marie-Emeline qui va jaspiner, pour sûr.

Là-bas, au loin sur la place, Pinaud vient de se fraiser la vitrine en essayant de rattraper bitos rabougri.
- Dites, chef, propose Mathias. Si on reprenait la poursuite avec la chouette auto que Pozzi a abandonné ?
- Tu rames du bulbe, Albinoche, je te dis qu’on a pas les clés. Le temps de trafiquer tout ça, le minus aura disparu pour de bon, tu penses : on lui a fourni la seule charrette qui colle à ses mensurations !
- Le dernier sésame que je vous ai fourni fonctionne aussi pour les autos, précise le Rougeoyant.

Pas faux ! (comme disent tous ceux à qui la mort vient rendre visite) Tu entends souvent parler de mon intemporel sésame, et bien sache que régulièrement, j’en change (quand son fils est allé chez le coiffeur, notre président a dit la même chose : « Jean change ! »), au gré de la modernisation des serrures. Le dernier modèle est effectivement façonné pour le détournement de guinde.

Nous nous ruons dans la Lamborghini (modèle Estoque ! l’un des seuls modèles Berline de la marque), qui nous parait d’autant plus spacieuse que nous sommes un de moins : Pinaud s’est perdu dans la nuit au gré de sa course laborieuse derrière son galurin. D’autor (mais à raison), je prends la place du conducteur. D’autor toujours (et d’auteur ! après tout, c’est moi qui écris), j’enfonce mon sésame magique dans la fente appropriée.

Je vais te dire : heureusement que mes sésames sont stériles, sinon, vu le nombre de portes qu’ils ont violées, ils auraient une descendance longue comme celle du prince Albert II ! (ça ferait des tas de petites clés de huis…) Si en plus je me mets aux guimbardes, mate-moi l'arbre généalogique typé Guiness ! (je ne parle pas de bière)

Ah ! le plaisir de conduire une vraie bagnole ! Monsieur et madame Célère ont un fils ? Jacques ! Mes compagnons en ont le slip plaqué dans leurs fauteuils.
- Où qu’il est parti ? je demande.
- Cours Albert Thomas, signale Eloi en me montrant une artère assez large.

Dans l’obscurité et le désert de la nuit (voilà une expression qui inspirerait beaucoup de mes amis les théatreux contemporains… servez-vous les mecs, régalez-vous, c’est cadeau !), j’aperçois tout juste les feux stops de la Mini qui finissent de tourner à droite, un peu plus loin. Harro sur le truand ! Il ne mesure qu’un mètre et voulait se mesurer à un maître ? Il va se finir par se faire mettre !
- Dites, demande soudain Eloi. Vous pensez qu’il s’est rendu compte que votre collègue était encore sur le toit de la mini ?

Fonce à ta bibliothèque préférée et jette toi sur le dictionnaire, s’il te plait. Puis cherche « stupeur », pour voir. Et si tu as la flemme de faire tout ça, si tu tiens à garder ton inculture crasse, contente toi de regarder ma fiole à cet instant précis, tu auras les grandes lignes de la définition sus-évoquée. Le gros ! Resté sur le toit de la Mini ! Je me retourne pour vérifier si le gone ne se paye pas ma poire (je sais pourtant que c’est au-dessus de ses moyens !), manque de peu de foutre la Lamborghini dans une station essence, redresse en catastrophe, puis pile pilepoil à trois centimètres d’une Super 5 mal garée.

- Pourquoi cet Empaffé n’est-il pas descendu de son perchoir ? m’étouffé-je.
- Aucune idée, lâche Jéjé. On s’en est rendu compte quand Pozzi s’est enfui.
- Pouviez pas me le dire, non ? j’enrage.
- On pensait que vous l’aviez vu, Patron, plaide Mathias pour se couvrir[1].

Je redémarre, inquiet.
- Il aurait pas morflé une bastos des sbires de Pozzi quand on a quitté l'Isara ? demande Eloi.
- C’est ce que je crains, laconiqué-je.

Je mets la sauce. Si Béru est resté immobile et silencieux sur l’Austin mini, c’est qu’il est méchamment blessé ! La Baudruche est restée tant de fois debout et fier après avoir pris des belles roustes… La possibilité d’un coup dur pour l’Hénaurme, voilà une idée qui me fait sérieusement cailler le raisin dans les vaines veines ! Dans la voiture, tout le monde se tait, sauf les 140 chevaux du moteur que je malmène. Las ! Plus trace de la minuscule auto de Marie-Emeline ! Pozzi a du bifurquer un certain nombre de fois et se perdre dans les petites rues alentours. Nada.

[1] Raffinée, celle-là ! Non ? (s) Sana

jeudi 1 avril 2010

San-Antonio à l'Isara : Chapitre 20

Ne confondons pas mini-caisse et gros prout

Mon appareil photo me le disait dernièrement : soyons objectifs. La situation aurait bien besoin d’un coup de Lustrine, car elle n’est pas brillante. On est tartes, tous les cinq dans notre cage d’escalier. « Cage », c’est le mot ! Pas d’issue, aucune planque, nada ! Mon optimisme vient de prendre un coup de saton puissant dans les roubignoles : me voilà avec mes fidèles lieutenants, OK ! Mais pris entre deux feux, qui ne sont ni de camp, ni de joie !

Jéjé et Béru canardent l’escadrin, derrière nous, un peu au pif, surtout pour dissuader les sbires de Pozzi de (nous) descendre un peu trop. Pinaud et moi-même, nous essayons d’en finir avec les trois zouaves du hall, qui se sont planqués soigneusement derrière le bureau d’accueil. Combien de temps ça va aller, tout ça ?
- Faudrait tenir jusqu’à l’arrivée de la poulaille, crie Jéjé. Ça défouraille quasiment en continu depuis 20 minutes, ici… y aura bien un particulier du voisinage qui, importuné par le bruit, aura fait le 17 !
- On est dans un coin où crèchent essentiellement des boites ! je réponds. Et pas des boites de nuit ! Les immeubles d’habitation les plus proches sont à tatawin ! Et puis là-haut, les volets étaient fermés, et ici, on est dans une cage d’escalier sans fenêtre… Rien à espérer de police secours, grand !
- On pourrait toujours appeler nous-mêmes ? tente Baderne-Baderne.
- J’en suis là, signale Eloi, portable en main, mais ça me dit que je suis bien en relation avec le commissariat du deuxième arrondissement, merci de patienter quelques minutes.
- J’enrogne d’avoir empêchié le Rouque de faire la pelle à la maison Pébroque du coin dès l’départ, rouscaille Béru. J’ai pêchié par morgueil : j’imaginasse qu’nous fussames capab’ d’gérer la crise entr’nous !

Et moi de lui avoir dit de jouer cassos pour suivre Pozzi : nous n’avons d’aide à attendre de personne. Pauvre Mathias : je l’imagine pistou (pardon : pistant) le macaroni jusqu’à Naples en espérant vainement que nous le rejoindrons bientôt !
- On tenterait pas une sortie tant qu’on en a encore dans le chargeur ? propose Jéjé.
- J’aime cette po-prose-ition ! approuve le Majestueux.
- Ce me semblerait plus respectable que de rester ici pour lâcher la rampe dans cette situation, ajoute le Débris, même si cet escalier offre un double sens amusant à l’expression. Oncques ne sauraient nier que nous avons tous, je parle au nom d’Alexandre, de Jérémy, d’Antoine et de moi-même –excusez mon silence à votre endroit, jeune homme, je n’ai pas le plaisir de vous connaître– oncques, disais-je, ne saurait nier de manière crédible que nous avons survécu à des situations ô combien plus dangereuses et périlleuse qu’icelle (je parle de la situation actuelle). Il serait particulièrement navrant de céder face à de simples maffieux quand les tyrans les plus puissants, les armées les mieux armées, les malfrats les plus fieffés, ont toujours eu à baisser l’échine face à nous autres ! Souffrez, puisque je suis responsable de notre impasse, que je me présente en tête de notre groupe face à l’ennemi.
- C’est fini les salami-lecs, oui ou merd’ ? s’emporte l’Hénorme. J’ai p’us qu’deux dragées dans l’magazine, on y va zou pas ?
- Validé ! approuvé-je, rempli de détermination, bien que mon python soit, lui, à nouveau complètement vidé. Go !

C’est craignos : nous fonçons (petite remarque au passage : le ciel, lui, devrait bientôt commencer à s’éclairer) tête baissée sur trois mecs armés en ayant nous-mêmes des armes quasiment à sec pour soutenir notre assaut. C’est un peu suicidaire, et la probabilité veut que tout ou partie de notre escouade y laisse son slip. Mais tu ferais quoi ? Tu attendrais que ça passe ? Faut avoir déjà été arrosé pour savoir ce que ça fait. Les rafales qui te taillent un short, c’est pas une pécadille, crois-moi (ce que Ponce Pilate disait régulièrement pour rigoler) ! Ça te pousse à l’action, même bête, même désespérée.

Nous nous apprêtons à foncer dans le tas, donc. Ce qui ne s’avèrera, en définitive, pas utile, puisque dans un fracas de vitre brisée et un grondement de moteur poussé à fond de première, une Austin Mini rose vient d’envahir l’Isara. Textuel ! Le bolide fonce doit sur le bureau d’accueil. Panique chez les Italoches ! Nos trois vide-flingues décarrent en quatrième vitesse de derrière leur planque. Trop lentement pour l’un d’entre eux, qui se fait faucher par la Mini. Trop vite pour les deux autres, qui se font cueillir par Jéjé, Béru et Pinuche. Poum, poum ! L’échappatoire de ces messieurs est avancée… (comme les lettres A et B, me signale Bernard Pivot).

On se précipite vers cette arche inattendue : derrière, ça pousse, sans jeu de mots scatophile. Si on veut pas en prendre plein les endosses juste au moment où la fuite par l’avant est possible, faut mettre les bouts. Seulement voilà, vu l’effectif, un monospace eut été plus indiqué ! Jéjé, Pinuche et Eloi se serrent sur la minimaliste banquette arrière ; je prends ma place habituelle, siège voyageur, ce qui ne m’assure aucun confort supplémentaire : il y a à mes pied tout un foutoir électronique que je n’identifie pas ; Béru, enfin, se répand sur le toit, qui ploie sérieusement.

Derrière le bureau d’accueil, j’aperçois le veilleur de nuit, qui, sereinement, continue d’en écraser. Le gaz sopo de Leton étaient aussi bien réalisés que ses bombes ou sa came, ma parole ! Je me dis que ce gardien va avoir une drôle de surprise quand il se réveillera dans un hall ravagé, au milieu des cadavres.

A l’intérieur de la tire, t’aurais pas la place d’ajouter une feuille de papier-cul ! Mathias, providentiel, parvient à redémarrer aussi sec.
- Tu tombes à pic, enflammé ! je m’exclame. Mais ne t’avais-je pas enjoint de suivre Pozzi ?
- Attention, il y a une dénivelée juste après la sortie, répond Mathias.

C’est une réponse comme une autre. Incontestablement, nous dévalons une volée de marches dans une série de secousses considérables. Les pneus et les essieux nous interprètent un duo de grincements en choc bémol majeur, et Béru rebondit plusieurs fois sur le toit, qui s’affaisse de 5 centimètres supplémentaires à chaque heurt. La môme Marie-Emeline va récupérer son auto dans un état moyen, je gage !

- T’es chié, ton coude enfoncé dans ma fesse ! se plaint Jéjé auprès de l’amère Loque.
- J’ai avalé ma cigarette ! s’exclame le Déchet pour toute réponse.
- Recrache pas, je réplique, on a plus la place pour ton mégot !
- Faut lâcher les ch’valets ! s’exclame Béru depuis l’extérieur. Les ritaux nous canardent sans disque-continuer !

Des balles sifflent autours de nous, certaines atteignent la carlingue. Bien que le haut des roues frottent quasiment le châssis, nous continuons d’avancer. D’un geste, j’indique au rouillé qu’il faut mettre les gaz.
- Heureusement que vous n’étiez pas là quand j’ai du effectuer la montée des marches, remarque l’incandescent en accélérant. Ce n'était déjà pas facile à vide...
- Fais-nous pas languir, Rouillé : comment te trouves-tu encore là ? je redemande.
- Vous m’avez demandé de pister le petit homme au costume, patron : le faire avec une Austin Mini rose n’aurait pas été facile, vous êtes d’accord ? Trop visible ! J’ai donc discrètement envoyé un tout petit émetteur aimanté de mon invention sur la tôle de l’auto quand elle est passé à mon niveau. Grâce au radar que j’ai installé à vos pieds, nous pouvons très facilement suivre sa trace. Ainsi, j’ai pu rester et intervenir en votre faveur quand j’ai senti qu’il y avait du grabuge.
- Un génie ! je m’exclame. Comment allume-t-on ce radar ?
- On lâcherait pas un peu de lest avant tout ? demande Jéjé. On étouffe ici !
- Pas le temps : on a des gorilles armés au cul, faut mettre un max de distance entre eux et nous. Et puis, après tout, vous m’avez rejoint pour qu’on résolve l’affaire-Isara tous ensembles. Faisons-le !