vendredi 26 février 2010

San-Antonio à l'Isara : Chapitre 11

Un bond en avant n’est pas strictement équivalent à un triple sot

Pour tout dire, je n’ai pas envie de gamberger. J’ai même l’intention inverse ! Tu comprends, dans mes aventures, il m’arrive parfois de me retrouver traqué par 36 malfrats armés jusqu’aux dents, en n’ayant pour équipement qu’un cure-dent, un préservatif périmé et cinq kleenex, dont deux usagés. Alors, je survis. Et mon corps agit tout seul pour se sauver, comme un grand ! Je saute au dessus des mines, j’évite les bastos, je castagne des mastards, je tronche des nénettes, je soigne mes blessures, je surmonte la douleur, j’en inflige à d’autres, je pense à Maman.

A part pour cette dernière action, en quoi est-il nécessaire de réfléchir quand on fait tout cela ? L’ensemble est fatiguant pour le corps, certes ! mais reposant pour l’esprit car la viande s'auto-gère.

Dans la présente enquête, je n’ai pas encore donné de ma personne. Pas le moindre coup de feu (ni un coup de dard !). A ce stade là, c’est assez (cul) rare. Mais j’ai subi les évènements, et ce n’est pas mieux. Trimballé à droite, à gauche, au centre, ailleurs, me contentant de ramasser les cadavres et les points d’interrogation. Un vrai filon ! Les spécialistes, habituellement, ne donne jamais leurs coins, pas vrai ? Moi je te livre sur un plateau (en forme de book) une vraie mine d’énigmes, de quoi en distribuer à tous tes amis ! Et compter les mortibus sans rien entraver, tu ne devineras jamais à quel point ça use.

Mon cervelet fume, actuellement, il faut le refroidir d’urgence pour éviter la surchauffe. Macabocheabesoind’espace[1]. Pour démultiplier la vitesse de mes gamberges ultérieures, pour fluidifier et clarifier les précédentes, il me faut faire tout autre chose. Jaffer ? Lichetrogner ? Limer ? Pioncer ? L’Isara n’est pas loin du Ninkasi Kao, le rade où toute cette histoire a indirectement commencé. On peut y picoler, y commander un sandwich, y rencontrer une gerce. Banco pour le Ninkasi ! J'y file.

Le hasard, c’est quelque chose, tout de même ! Il faut savoir le reconnaître. Alors que je m’apprête à traverser le boulevard Jean Jaurès, dernière artère me séparant d’une bonne binouze, une voiture s’arrête devant mon pif. Qui la conduit ? Si je te dis Marie-Emeline, tu ouvriras une bouche ronde comme ton anus. Si je te parle d’une rouquine sexy, pas mal moulée, poitrine pas déraisonnable mais ferme, alors tu ne verras toujours pas de qui il s’agit, mais ton tout petit chibron s’agitera à ta place. Je suis donc obligé de te rappeler que c’est précisément cette demoiselle que j’ai rencontré lors de mon premier passage au Ninkasi Kao.

- Vous cherchez quelque chose ? demande-t-elle avec son sourire testeur d’élasticité de slip.
- Mais… oui, chère Marie-Emeline : vous ! tac-au-taqué-je avec mon sourire testeur d’imperméabilité pour culottes friponnes. Depuis deux ans, j’ère dans ce quartier à votre recherche, au comble du désespoir !
- Vous, alors ! pouffe-t-elle.
- Moi alors ! confirmé-je. Ce n’est pas très chouette de m’avoir laissé quimper tel une vieille paire de chaussettes superfétatoires[2], dites !
- Quimper, quimper ! riposte la jeunette. Vous êtes Breton ou quoi ? Allez, montez donc, je vous dépose ! Pour me faire pardonner…

Elle a le chic, cette môme, franchement. Au moment de sa dernière tirade, mon bénouze en subit une (de tirade) sacrément carabinée, Calabity Jane peut en témoigner ! Et je remercie secrètement la machine qui a conçu mon grimpant d’en avoir solidement arrimé le bouton au reste, car vu la pression que subit mon falzar, un défaut de qualité aurait pu avoir comme conséquence un catapultage express du suce-dit bouton en plein de l’œil salingue de cette chère Marie-Emeline.

Qu’est-ce que t’en dis ? Qu’est-ce que tend, dis ! Je renonce à la becquetance et à l’écluse pour rejoindre la miss ? Le temps de me poser la question, je suis déjà assis dans la chouette auto. Il s’agit d’une Austin Mini première génération. L’étonnant est que, malgré son gabarit minimaliste, cette guinde est relativement spacieuse à l’intérieur. Je me fais d’ailleurs exactement la même réflexion en reluquant la jupe de Marie-Emeline, qui aurait tout juste assez d’étoffe pour constituer une chaussette pour ta petite nièce de six mois.

- Bien installé, monsieur le commissaire ?
- Ah, les présentations se sont faites d’elles-mêmes ? constaté-je.
- C’est mon copain Eloi qui m’a parlé de vous, justement la fois où je vous ai… euh… disons… enfin, vous savez, comme il est finalement arrivé… je ne pouvais pas… vous savez ce que c’est…
- Bien sûr que je le sais, belle enfant, puisque le rôle du type qui souffle les beautés sous le pif des autres, c’est celui pour lequel j’ai été primé 7 fois d’affilée -série en cours- aux Biroute awards.
- Ah ! soulage-t-elle. Bon. Où est-ce que je vous pose ?
- Au septième ciel ! suggéré-je en jouant à papier-feuille-ciseaux avec sa poitrine (partie gagnée, puisqu’elle oppose une « pierre » bien ronde à ma « feuille » baladeuse).

Ce geste est le top départ d’une frénésie que rien ne freine (ésie), pas même le gentil chat qui traverse la rue à cette instant (miaou… paf ! ce qui est très proche de la partie de minou-paf qui s’annonce).

- Oh oui, souffle Marie-Emeline, qu’on aurait du appeler Marie-Aime-Lime, en engageant son Austin Mini dans un parking obscure. Elle n’a déjà plus de corsage ni de soutif quand elle gare la guinde en épaille (entre épi et bataille, excusez-la, elle était occupée pendant la manœuvre). Puis elle hurle avec une excitation sans sueur et des points de suspension censeurs :
- Prends-moi vite ! Je veux… langoureusement ton… je veux sentir ta grosse… qui… dans mon… fous-moi donc ta… entre les… !

Ce dont je m’empresserais volontier ! Mais tu sais… Enfin non, tu ne sais pas, puisque tu es aussi vierge que la liste des promesses présidentielles tenues entre 1995 et 1997… mais je te certifie que forniquer dans un véhicule à permis B n’est pas une sinécure. Dans une Mini, le défi prend des allures de challenges sportifs ! Un minimum de savoir-faire s’impose pour réussir, déjà, à dénuder la partenaire. Le chrono indique 12 secondes 14 centièmes, record d’Europe égalé. L’essentiel de mes frusques étant également hors de combat, les contorsions peuvent commencer. Et la première consiste à chopper mon portable dans la poche de ma veste qui a atterri sous la banquette arrière.

Un sex-toy improvisé ? Que non point ! Les vrais pro n'ont pas besoin de ces gadgets. Non, simplement, le turlu a sonné. En même temps que l’heure de la fin du zizi-panpan ! C’est Eloi qui appelle. Il n’a décidément pas son pareil pour interrompre mes envolées avec Marie-Emeline.

- Gone, j’espère que tu es sérieusement en danger pour m’appeler là, maintenant ! je rouscaille.
- Pas en danger, commissaire, mais embusqué, ça oui, chuchote le gamin.
- Précision, por favor ?
- Paul Uduku, le pote qui m’a demandé de venir pour l’aider pour le cours d’Arnaques Appliquées : il m’a tendu un piège ! J’ai pu rentrer dans son immeuble en suivant une mémé, donc sans utiliser l’interphone. Arrivé à l'étage de son studio, je l’ai entendu parler au téléphone à travers la porte… Il parlait de Durêve à un autre type, et il a évoqué un rendez-vous à l’Isara, cette nuit, 5 heures du matin. Tu notes ? En étant propres, on coince au moins trois vilains d’un coup !

Allons bon ! Des heures et des heures à glander de macchabé en macchabé sans l’ombre d’une avancée, et maintenant que je prends une pause coquine et une pose méritée (à moins que ce ne soit l’inverse ?), PAN ! Un bond spectaculaire !

- Où t’es, gars ? je demande.
- Je te l’ai dit : embusqué dans la cage d’escalier de Paul. Il a dit à son interlocuteur que je serai chez lui d’ici peu, et qu’il ne fallait donc pas qu’il tarde.
- Casse-toi vite fait, gone, alors ! Le gars du téléphone est probablement pas un facteur vendeur d’almanach !
- Peux pas : ma twingo est complètement coincée par un camion qui décharge !
- Use tes nougats, grand, si tu veux pas te faire arquepincer par les filous ! je tonne.

Il est manche ou quoi ? Moi, en tout cas j’emmanche mon futal jusqu’à mi-cuisse : ce qu’il y a au-dessus est pour le moment occupé pour un test de la capacité buccale –plutôt honorable– de Marie-Emeline qui, de toute évidence, ne s’offusque pas de ma goujaterie. Elle a d’ailleurs fort à faire pour maintenir concernée (et pas par un con cernée, hélas !) la partie de moi-même qui l’intéresse le plus.

- Ecoute, me dit le Gone, si je ne me rends pas chez lui, Paul va tiquer ! Et alors peut-être annuler le rendez-vous à l’Isara ! On se retrouverait Sébastien Grosjean comme devant… en restant ici, je peux au moins essayer de suivre les opérations adverses…
- Bah Eloi, qu’est-ce que tu fous dans le noir ?

Voilà une voix que je n’ai jamais entendue. Facile de mettre un nom dessus cependant : le dénommé Paul Uduku vient d’entrer dans la danse.
- Marie-Emeline, imploré-je, arrête donc ton opération de sars-nettoyage : tout est propre !
- Alors quoi ? s’indigne la môme. On arrête tout ? Si les hommes commencent à interrompre les coïts avant que les préliminaires ne soient entamés, où va-t-on ?
- Chez Paul Uduku ! je réponds. Tu connais ?
- Paul, je l’appelle personnellement « Mou du gland », commente la rouquine mignonne. Oui, je connais, il a bite[3] vers la station de métro Garibaldi.
- Go !
- Hé bin vous alors… murmure-t-elle en cherchant son string-dentelle sous mon siège.
- Pas le temps de se rhabiller, bon sang ! Roule !
- Hé bin vous alors !

La môme remet le contact. Détail amusant, j’ai oublié de lui enlever ses bottines. Cette nana au volant à loilpé sauf les pieds, ça a quelque chose d’un peu cocasse, tu dois le reconnaître, même toi qui as lu l’intégrale de mon œuvre et qui en a donc vu d’autres ! Je colle à nouveau mon esgourde à mon téléphone :
- …non, non, Paul, j’avais juste oublié quelque chose dans ma voiture, je te rejoins dans une minute, affirme Eloi, que j’entends mal, car il a probablement glissé son portable dans la poche de son blazer.
- Qu’as-tu oublié ? demande Uduku.
- J’avais quelques Kro dans le coffre pour rendre les révisions plus agréables…
- C’est cool mais j’ai un tas de bières au frais, inutile de redescendre.

Le gone tente bien de gagner du temps, de ne pas se laisser entrainer dans le piège de son « pote », mais il ne va pas pouvoir jouer ce jeu trop longtemps sans paraître suspect.
- Y aurait moyen de se magner le fion ? je demande à Marie-Emeline.
- Hé, ça va aller les amabilités, oui ? elle riposte. Je pourrais bien te foutre dehors, flic ou pas, t’es dans ma caisse ici !

Seigneur ! La voilà fâchée. Une seule chose à faire : la caresser dans le sens du poil de minou. Je lui colle un doigt dans la moniche.
- Je te promets que tu auras pris ton maxi-fade à l’arrivée si tu déhottes plus vite que ça !

Marrant comme ce simple geste la fait pousser sur l’accélérateur !
- Combien de temps jusqu’à Garibaldi ? je demande.
- Je… oh, commissaire… je… oui ! Oui ! Cinq… cinq minutes…

Je me rebranche sur le canal Eloi :
- Bon, qu’est-ce qu’il y a, demande Uduku, impatient. Tu veux plus m’aider ou quoi ?
- Mais non, ce n’est pas ça, se défend Eloi. Je veux juste…

Court silence. Pendant un instant, les clapoires sont fermés de l’autre côté de la ligne... une nouvelle voix se fait entendre :
- Qu’est-ce que c’est que ce foutoir ?
- Ah Joss, lance Paul Uduku, tu tombes à pic : il allait se barrer.
- Qu’est-ce que ça veut dire, ça, Paul ? demande Eloi alors qu’il comprend très certainement qu’il s’enfonce dans la mouise.
- Et bien ça veut dire que tu vas suivre sans attendre ton copain Paul, sinon je t’orne d’un trou supplémentaire, menace le nouvel arrivant.
- Voilà qui est aimable !

Je jette un œil sur le compteur de vitesse de la môme Marie-Emeline. Elle carbure déjà à 70 km/h en pleine agglomération sous l’effet de mon petit massage de froufrou. Mais si je veux arriver à temps pour empêcher les soucis au gone, je dois presser l’allure encore. Il n’y a plus qu’une solution : là où ma dextre fait gagner quelques km/h, ma menteuse peut faire péter les compteurs ! Je m’incline et commence donc à faire tourner sept fois ma langue dans ce qui n’a que les lèvres en commun avec ma bouche. La môme attaque à gémir, et je suis un instant plaqué contre elle sous l’effet de l’accélération brutale de l’auto.

Dis-moi, et sois honnête : c’est du jamais lu, cette situation, non ? En tout cas, c’est du jamais-écrit ! T’as déjà vu James Bond ou Tintin en train de brouter une bonne amie pour la faire appuyer sur le champignouf tout en écoutant par téléphone interposé un poteau se faire serrer par des voyous crapuleux ?

En tout cas, j’ai trouvé l’essence de Marie-Emeline, son carburant à elle, ce qui la fait avancer : la luxure. C’est qu’elle met la gomme, la petite. C’est fou, quand on y pense ! Des excitées pareilles, y en a pas moult... Je me demande comment ça turbine dans sa tête... Dans sa capsule céphalique, c’est phallique, j’ai l’impression !

Mais revenons à nos Motorola :
- Mon pauvre vieux, lance Paul d'un ton badin, te voilà dans une belle situation !
- A qui le dis-tu ? peste Eloi. Tu peux toujours courir pour le soutien en Arnaques Appliquées. On m’y reprendra, tiens, à rendre service !
- On t’y reprendra surtout pas à foutre ton tarin dans des zones où tu n’es pas le bienvenu, lâche la troisième voix, celle du dénommé Joss.
- C’est la merde ! ponctue Eloi. Qu’est-ce que vous allez faire de moi ?
- Ta gueule.

Dans l’Austin Mini, l’envolée finale n’est plus très loin. Je ne peux m’empêcher de m’inquiéter pour le môme Eloi. Une sorte d’instinct paternel, tu crois ? Ce jeune type qui me rappelle Toinet, ça me ferait mal au dargif qu’il se ramasse dans cette histoire. Et puis, merde : je me suis foutu de sa gueule quand il m’a déballée son histoire de sérial killer à l’Isara : maintenant, le minimum c’est de résoudre ce merdier, et qu’il soit là pour entériner l’exploit, nom de nom !

- Marie-Emeline, mon doux cœur, sommes-nous bientôt arrivés ?
- Rah me laisse pas me refroidir ! rouscaille la rousse caille. Deux minutes si tu reprends toute de suite, trois si tu lambines bêtement !

Je replonge illico dans la toison, reprenant mon improbable turf catalyseur d’allure automobile.
- Paul, plonge donc le nez de curieux de ton ami dans ce mouchoir, ça va le calmer un peu, annonce Joss dans mon oreille.
- Dans les films, pour faire taire le gentil, le méchant lui assène un coup de crosse dans la calebasse, fait remarquer Eloi avec un sang-froid que n’aurait pas eu Sancho. Vos méthodes manquent totalement de classe…

S’ensuit (sang suisse hanse huis sangsue y sans suif) un bruit de lutte assez bref, puis un silence saoul d’Ain (01). Le môme a respiré ce que j’imagine être du chloroforme, et il est désormais dans les vapes. Restent nos crapules :
- On va pas le tuer, non ? demande Paul Uduku.
- Non : le commissaire doit le savoir vivant pour nous refiler toutes les infos dont on a besoin. San-Antonio est un balèze, s’il se rend compte qu’on le roule, ça pourrait mal tourner pour nous. La vie de ton pote assurera sa docilité. Fouille-le !

Hop-hop-hop ! Je m’empresse de raccrocher. Faut surtout pas que ces rigolos sachent que j’ai tout entendu. Quand ils trouveront dans sa poche le portable d’Eloi (table des lois !), il ne doit pas indiquer connement « San-Antonio – en ligne ». Dans le genre ballot, ce serait le pompon, non ?

L’oreille et l’esprit libre, je peux désormais m’occuper avec un peu plus d’attention de la miss Nympho qui me conduit. Note que je pourrai tout arrêter : la séance de bouche à fouffe et la course contre la montre. Pardi ! Je sais maintenant qu’Eloi ne risque rien dans l’immédiat. Mais je suis gentleman et je tiens à être contractuellement inattaquable. Il faut donc, vu tous les risques qu’elle prend, que Marie-Aime-Pine prenne également du plaisir, puisque je m’y suis engagé (au sens propre comme au figuré) ! Un détail marrant : bien que rouquine, elle ne pue pas de la chaglatte ! Me demande pas pourquoi, mais niveau odeur, elle me fait plutôt penser à un bon muscadet.

[1] Comme cette phrase !
[2] Deux membres de l’académie française ont eu une attaque lisant « quimper » et « superfétatoire » dans la même phrase. Si les autres l’avaient également lu, ils auraient probablement subi le même sort.
[3] Une vraie excitée, cette Marie-Aime-Bite !

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