« réunis » est l’anagramme de « suriné », « urinés » et « ruinés » !
Je fixe mes sauveurs encagoulés. Et m’exclame :
- Vous ! Ici !
- Bravo les mecs, c’est le gros lolot ! maugrée Béru en enlevant sa cagoule. On l’a in the baba en profonde heure : not’ surprise du chef qu’est flanquée à la baille aux corneilles, biscotte z’êtes incapab’ d’fermer vos clapoirs pour la mett’ un peu en sourdingue. Dans l’genre dix-craies, vous êtes des peintures ! Pas duraille de vous retapisser : un môme d’treize ans, il vous soutif n’importe quelle info stop-secrète en deux tantes, trois moulements… V’là où ça mène de jaspiner à qui meuh meuh. Quand j’pense qu’j’ai failli r’noncer à mon rab d'Montbazillac dans le t’es-givré, soif disant que la vinasse risquait d’me perdre-turber dans l’turbin ! C’est pas moi qu’est saoul au point de rêver-laid notre présence ici en rend-fort, que je susse ? Alors, on s’décarcrasse pour s’mett’ en fouille un conducteur « Est-ce N ? c’est F ! » pour débouler z’ici coup d’eau corps en pleine nuit, on savate trois zigs pour récupérer leurs nippes et z’arriver su’l’champ d’bataille la tête en-taboulé sous ces bonnets étouffe-crétins pour naître reconnu de personne… tout ça en vin ! Biscotte ? J’va te l’dire Sana : biscotte môssieur Peinture Noire a des états-dames à bombarder les gentils truands Suze-dits, alors qu’en défi ni tif, y a pas trente-six r’mèdes : un’ bastos pour chacun, le comté bon !
Je mate, ébahi, Pinuche et Jéjé enlever leurs cagoules également. Même en voyant leur tronche mi-amusée par la situation, mi-déçues par la manière dont elle s'est révélée, je n’ose en croire mes yeux.
- Mais comment vous êtes vous libérés de vos impératifs parisiens ? m’émerveillé-je. Le conseil de discipline de Béru ? La maladie de Ramadée ? Et comment, comment se peut-il que vous vous trouviez ici ?
- Ramadée va mieux, lâche brièvement le Noirpiot. Et puis ça m’embêtait de te laisser seul, loin de nous tous.
- C’est l’rouque qu’est à l’orgie-gine d’la farce, assure le Gros. Semblerait qu’tu t’sentasses seulabre sans les aminches, d’après lui ! Z’alors ni lune, ni bœufs, il nous à râpe-à-trier ici dans ce bon vieux département des côtes du Rhône, nous, tes alcoolites.
- T’étais censé être bloqué à la maison poupoule jusqu’à ton conseil de discipline, Gros ! je m’exclame. Tu risque Grosse Pomme[1] !
- Pas d’soucis pour mézigue : j‘ai parvenu à con-vaincre la grosse Nadine de pas m’attaquer, triomphe l’Hénaurme. Toi qu’affirmais qu’j’avais tout faux en essayant d’lui r’proposer une grimpette ! J’l’ai eu par derrière, à la cantine, juss’ après ton départ. L’plus duraille a z’été d’planquer Popol en éruption sous mon plateau. Et d’résister à l’attentat-scions de jaffer l’cassoulet qu’j’m’étais pris ! Quand elle a voulu s’assoir, j’me suis précibité sur sa chaise –skié pas z’aisé avec le grimpant aux chevilles- et j’ai joué au bilboquet z’avec sa chaglatte. Du velours : la vachasse taille large et n'porte rien sous sa jup'. L’rodéo en public, c’est pas si simp’, mais j’l’ai faite bicher prop’ et net ! Après cette séance, l’était plus prête de d’mander un bisse queue de m’traîner d’vant les p’tits Bruno.
- C’était d’ailleurs inutile, intervient la Pine en s'échauffant. Tu sais très bien qu’avec le plaido… le plod… déployer… que j’avais échaff… achéfaud… échauffadé tu t’en serais sorti sans problème.
- César a quand même été utile pour le transport, intervient Jéjé : Mathias nous a prévenu assez tard et les TGV ne roulent plus après une certaine heure…
- Mon tailleur a un frère qui travaille aux Pétété, tu sais ? explique Pinuche qui s’est procuré une ceinture, mais dont la braguette est grande ouvert, de manière à ce que son triste slip reste visible. Et bien son autre frère est pilote de Tégévé, figure-toi… On l’a convaincu, moyennant une entrée gratuite à la ferme pédagogique de Saint-Locdu-le-Vieux, de nous conduire ici au plus vite pour ne pas rater le dénouement !
Qu’ils sont complémentaires ! Qu’ils sont cons, tout court… Qu’ils sont beaux… Qu’ils sont là ! Ils ont volé un TGV pour venir à la rescouscousse[2] ! Dis, t’en as combien des amis de ce gabarit ? Pour voir ? Ah, et le Flambé ! Ce cachotier sublime, ce mystérieux imprésario de notre groupe si génial… M’en vais te lui négocier une augmentation de 300%, moi ! Que peut-il nous arriver ? Quel danger ridicule pourrait gâcher ces retrouvailles ? Tu peux me le dire ?
Les chats me font marrer, avec leurs neuf vies. Où est le suspense ? Où est le marrant ? Qu’ils les gardent, leurs neuf vies, elles ne valent pas mes quatre lieutenants, mes quatre porte-flingues, mes quatre gaffeurs, mes quatre Huns, mes quatre -oserai-je le dire ?- fidèles amis ! (ah, tu vois, j’ai osé) Avec eux, je n’ai pas neuf vies, j’en ai cent ! J’ai ai mille !
Bon ! Puisqu’on est en famille, si on allait se boire une petit gorgeons de blanc ici où là ? L’affaire est résolue : Leton ne produira plus de drogue, Durêve ne fera plus assassiner personne. Tout est bien qui finit bien, non ? Ma liesse est partagée par le Gros, de toute évidence : quand il se met à siffloter « Les Matelassiers », c’est qu’il est heureux, Bibendum.
- Qu’est-ce que tu attends pour répondre ? demande Jéjé sans que je pige de quoi il cause.
- ‘ne minute ! temporise le Majestueux. L’début, c’est mon passage favori… on est pas aux fesses, si ?
- C’est ce brave Mathias, signale Pinaud en passant la tête par-dessus l’épaule de Béru.
Je remarque alors que l’air siffloté des Matelassiers ne provient pas de… euh… disons la bouche de Béru (faute de mot susceptible de qualifier plus précisément le clapoir de l’Immonde), mais de ce qu’il tient dans sa main, à savoir son portable.
- Avec Poilala, on s’est réconciliabulé, rigole Béru. Pour graver dans le bonze notre amitié réhabillée, on m’a enregistré une sonnerie d’portab’ en sifflant « Les Matelassiers » et un cubi d’rougeot ! L’problo, c’est qu’j’ai doré d’l’avant tant-danse à attend’ la fin d’la sonnerie pour décrochaga !
- Cesse de te poiler et réponds ! intimé-je (Béru et moi sommes quasi intimes, après tout).
- ‘ne seconde… là, n’écoute : « Voilà les matelas, les matelas, matelassiers qui paaaassent »… bon, bon, te mets pas en r’naud, Sana, j’va raie-pondre… Quoi t’est-ce, Rouque ? Ouais, ouais, tout s’est passé comme sur des boulettes ! Just’ le Noirpiot a pas su t’nir sa menteuse, on n’a pas pu faire le coude du gros tétonnement pour l’grand. T’eusses du v’nir avec nous, Rouque, même si que t’es pas trop un acidulé de l’action purée dure. Quoi-ce ? Parler au Tonio ? Faisab’, œuf corse. Sana, l’Rouillé sollicitre une converse !
Le gros me file son improbable téléphone, dont la touche 8 est remplacée par un câpre et la touche 1 n’est pas remplacée.
- Mathias ?
- Patron, il se passe des choses préoccupantes en bas, je préfère vous prévenir.
- Tu m’inquiètes ! Quel genre ?
- Le tout petit homme qui est entré tout à l’heure vient de ressortir de l’Isara avec un seul de ses hommes.
- Elémentaire, mon cher Mathias : les trois autres sont ici, plutôt trop morts pour se carapater.
- Ce qui est inquiétant, c’est qu’avant de s’enfuir, il s’est dirigé vers une fourgonnette et une voiture stationnées pas loin. Une dizaine de lascars en sont sortis, visiblement armés, et ils sont à présent dans l’enceinte de l’école.
- Merci du tuyau ! Laisse-nous nous démerder avec les truands, et suis le nain si c’est encore possible. Je te rappelle quand on est sorti du bourbier.
Je raccroche (si j’avais le sens du rythme, je ra-triolet-noire-double-crocherais !).
- Les gars, avez-vous croisé un nain en costard rital et son porte-flingue en arrivant jusque là ? demandé-je.
- Méga-tif, assure le gros. On a du les croasser : c’t’un vrai casse-dalle pour trouver son ch’min dans c’te turne.
- On est passé par un petit escalier secondaire en s'oirentant au bruit de la fusillade, ajoute Jéjé.
- On va jouer cassos par ce petit escalier sans attendre, mes drôles. Les spaghettis donnent l’assaut !
- Si les spaghettis donnent la sauce, pourquoi qu’on s’casse ? demande Béru.
Faisant fi de cette ultime remarque, nous faisons feu des deux fuseaux en direction du passage discret empruntés par mes fidèles (ils l’ont rendu après : la preuve, il est toujours là). Comme je m’y attendais, nous n’y croisons pas les malabars de Pozzi, qui ont probablement choisi la voie de leur maître pour grimper jusqu'au foyer.
Tout se goupil bien, comme dirait mon pote le renard ! Nous serons bientôt hors du guépier. Restera plus qu’à suivre la piste de Mathias pour coincer Pozzi. On le choppe, on le travaille deux minutes pour qu’il nous dise où est l’héro, on le fout au trou pour 200 ans. Ainsi, tous les malfrats de l’histoire mis hors d’état de nuire (pas ceux de l'Histoire, en revanche : que voulez-vous, je ne peux pas être tout le temps à la fois !).
- Eloi ! m’écrié-je soudain au moment où nous arrivons au rez-de-chaussée. On a oublié Joss Leton là-haut !
- Ah tiens, oui, merde ! Mais attends : il est pas mort ?
- Il a perdu connaissance après avoir pris une bastos dans la guibole. Mais il était vivant. Faut aller le chercher, sinon il va se faire ramasser par les gorilles de Pozzi.
- Trop tard, Grand ! s’exclame Jéjé.
- On a d’jà la patrouille su’l’derche ! ajoute Béru. T’entends pas ?
Clairement, on perçoit en effet le bruit d’une cavalcade au dessus de nous.
- Tant pis pour le chimiste, alors ! je peste. On trace droit vers la sortie.
- Pas la peine de s‘refaire un duel à OK Chorale, confirme le Gros. Faut mett’ la gomme recta !
- C’est bouché par devant aussi ! bêle Pinuche, qui vient de passer la tête dans le grand hall.
Je risque un œil, à mon tour (c'est relativement peu : Pozzi, lui, risque perpett'). Trois hommes de Pozzi sont restés en couverture car après tout les malfrats aussi peuvent avoir froid. Ils matent dans une direction qui n’est pas la notre (chacun sa direction, quoi, merde !) : en les bombardant simultanément tous les quatre, on devrait pouvoir se dégager un passage jusqu’à la sortie.
Las ! Au moment où je m’apprête à haranguer les autres, La Pine s’étale bruyamment et de tout son long en direction du hall. Cherchant probablement à débusquer une issue, Pinuche s’est avancé un peu avant de se prendre les pieds dans la doublure de son pantalon.
Naturellement, les trois porte-flingues postés dans l’entrée se muent en utilise-flingues instantanément. Au-dessus de nous, la cadence des foulées s’est sensiblement accélérée.
- Bougre de truffe ! m’emporté-je en tirant la Pine à l'abris. Quand on ne tient pas debout, on rampe !
- Ce pantalon n’est pas à moi, gémit la Baderne. Je l’ai pris aux brigands dont nous avons pris la place tout à l’heure, qui avait de bien plus gros mollets…
- Nous v’là beaux, les gars, pris z’entre deux feutres ! s’écrit l’Immonde.
Va encore falloir trouver un Deus et une ex-machina, j’ai l’impression !
[1] Sans doute fallait-il lire "T’étais censé être bloqué à la maison poupoule jusqu’à ton conseil de discipline, Grosse Pomme ! Tu risque gros !"
Signé : l'Editeur
[2] Dixit Béru
Je fixe mes sauveurs encagoulés. Et m’exclame :
- Vous ! Ici !
- Bravo les mecs, c’est le gros lolot ! maugrée Béru en enlevant sa cagoule. On l’a in the baba en profonde heure : not’ surprise du chef qu’est flanquée à la baille aux corneilles, biscotte z’êtes incapab’ d’fermer vos clapoirs pour la mett’ un peu en sourdingue. Dans l’genre dix-craies, vous êtes des peintures ! Pas duraille de vous retapisser : un môme d’treize ans, il vous soutif n’importe quelle info stop-secrète en deux tantes, trois moulements… V’là où ça mène de jaspiner à qui meuh meuh. Quand j’pense qu’j’ai failli r’noncer à mon rab d'Montbazillac dans le t’es-givré, soif disant que la vinasse risquait d’me perdre-turber dans l’turbin ! C’est pas moi qu’est saoul au point de rêver-laid notre présence ici en rend-fort, que je susse ? Alors, on s’décarcrasse pour s’mett’ en fouille un conducteur « Est-ce N ? c’est F ! » pour débouler z’ici coup d’eau corps en pleine nuit, on savate trois zigs pour récupérer leurs nippes et z’arriver su’l’champ d’bataille la tête en-taboulé sous ces bonnets étouffe-crétins pour naître reconnu de personne… tout ça en vin ! Biscotte ? J’va te l’dire Sana : biscotte môssieur Peinture Noire a des états-dames à bombarder les gentils truands Suze-dits, alors qu’en défi ni tif, y a pas trente-six r’mèdes : un’ bastos pour chacun, le comté bon !
Je mate, ébahi, Pinuche et Jéjé enlever leurs cagoules également. Même en voyant leur tronche mi-amusée par la situation, mi-déçues par la manière dont elle s'est révélée, je n’ose en croire mes yeux.
- Mais comment vous êtes vous libérés de vos impératifs parisiens ? m’émerveillé-je. Le conseil de discipline de Béru ? La maladie de Ramadée ? Et comment, comment se peut-il que vous vous trouviez ici ?
- Ramadée va mieux, lâche brièvement le Noirpiot. Et puis ça m’embêtait de te laisser seul, loin de nous tous.
- C’est l’rouque qu’est à l’orgie-gine d’la farce, assure le Gros. Semblerait qu’tu t’sentasses seulabre sans les aminches, d’après lui ! Z’alors ni lune, ni bœufs, il nous à râpe-à-trier ici dans ce bon vieux département des côtes du Rhône, nous, tes alcoolites.
- T’étais censé être bloqué à la maison poupoule jusqu’à ton conseil de discipline, Gros ! je m’exclame. Tu risque Grosse Pomme[1] !
- Pas d’soucis pour mézigue : j‘ai parvenu à con-vaincre la grosse Nadine de pas m’attaquer, triomphe l’Hénaurme. Toi qu’affirmais qu’j’avais tout faux en essayant d’lui r’proposer une grimpette ! J’l’ai eu par derrière, à la cantine, juss’ après ton départ. L’plus duraille a z’été d’planquer Popol en éruption sous mon plateau. Et d’résister à l’attentat-scions de jaffer l’cassoulet qu’j’m’étais pris ! Quand elle a voulu s’assoir, j’me suis précibité sur sa chaise –skié pas z’aisé avec le grimpant aux chevilles- et j’ai joué au bilboquet z’avec sa chaglatte. Du velours : la vachasse taille large et n'porte rien sous sa jup'. L’rodéo en public, c’est pas si simp’, mais j’l’ai faite bicher prop’ et net ! Après cette séance, l’était plus prête de d’mander un bisse queue de m’traîner d’vant les p’tits Bruno.
- C’était d’ailleurs inutile, intervient la Pine en s'échauffant. Tu sais très bien qu’avec le plaido… le plod… déployer… que j’avais échaff… achéfaud… échauffadé tu t’en serais sorti sans problème.
- César a quand même été utile pour le transport, intervient Jéjé : Mathias nous a prévenu assez tard et les TGV ne roulent plus après une certaine heure…
- Mon tailleur a un frère qui travaille aux Pétété, tu sais ? explique Pinuche qui s’est procuré une ceinture, mais dont la braguette est grande ouvert, de manière à ce que son triste slip reste visible. Et bien son autre frère est pilote de Tégévé, figure-toi… On l’a convaincu, moyennant une entrée gratuite à la ferme pédagogique de Saint-Locdu-le-Vieux, de nous conduire ici au plus vite pour ne pas rater le dénouement !
Qu’ils sont complémentaires ! Qu’ils sont cons, tout court… Qu’ils sont beaux… Qu’ils sont là ! Ils ont volé un TGV pour venir à la rescouscousse[2] ! Dis, t’en as combien des amis de ce gabarit ? Pour voir ? Ah, et le Flambé ! Ce cachotier sublime, ce mystérieux imprésario de notre groupe si génial… M’en vais te lui négocier une augmentation de 300%, moi ! Que peut-il nous arriver ? Quel danger ridicule pourrait gâcher ces retrouvailles ? Tu peux me le dire ?
Les chats me font marrer, avec leurs neuf vies. Où est le suspense ? Où est le marrant ? Qu’ils les gardent, leurs neuf vies, elles ne valent pas mes quatre lieutenants, mes quatre porte-flingues, mes quatre gaffeurs, mes quatre Huns, mes quatre -oserai-je le dire ?- fidèles amis ! (ah, tu vois, j’ai osé) Avec eux, je n’ai pas neuf vies, j’en ai cent ! J’ai ai mille !
Bon ! Puisqu’on est en famille, si on allait se boire une petit gorgeons de blanc ici où là ? L’affaire est résolue : Leton ne produira plus de drogue, Durêve ne fera plus assassiner personne. Tout est bien qui finit bien, non ? Ma liesse est partagée par le Gros, de toute évidence : quand il se met à siffloter « Les Matelassiers », c’est qu’il est heureux, Bibendum.
- Qu’est-ce que tu attends pour répondre ? demande Jéjé sans que je pige de quoi il cause.
- ‘ne minute ! temporise le Majestueux. L’début, c’est mon passage favori… on est pas aux fesses, si ?
- C’est ce brave Mathias, signale Pinaud en passant la tête par-dessus l’épaule de Béru.
Je remarque alors que l’air siffloté des Matelassiers ne provient pas de… euh… disons la bouche de Béru (faute de mot susceptible de qualifier plus précisément le clapoir de l’Immonde), mais de ce qu’il tient dans sa main, à savoir son portable.
- Avec Poilala, on s’est réconciliabulé, rigole Béru. Pour graver dans le bonze notre amitié réhabillée, on m’a enregistré une sonnerie d’portab’ en sifflant « Les Matelassiers » et un cubi d’rougeot ! L’problo, c’est qu’j’ai doré d’l’avant tant-danse à attend’ la fin d’la sonnerie pour décrochaga !
- Cesse de te poiler et réponds ! intimé-je (Béru et moi sommes quasi intimes, après tout).
- ‘ne seconde… là, n’écoute : « Voilà les matelas, les matelas, matelassiers qui paaaassent »… bon, bon, te mets pas en r’naud, Sana, j’va raie-pondre… Quoi t’est-ce, Rouque ? Ouais, ouais, tout s’est passé comme sur des boulettes ! Just’ le Noirpiot a pas su t’nir sa menteuse, on n’a pas pu faire le coude du gros tétonnement pour l’grand. T’eusses du v’nir avec nous, Rouque, même si que t’es pas trop un acidulé de l’action purée dure. Quoi-ce ? Parler au Tonio ? Faisab’, œuf corse. Sana, l’Rouillé sollicitre une converse !
Le gros me file son improbable téléphone, dont la touche 8 est remplacée par un câpre et la touche 1 n’est pas remplacée.
- Mathias ?
- Patron, il se passe des choses préoccupantes en bas, je préfère vous prévenir.
- Tu m’inquiètes ! Quel genre ?
- Le tout petit homme qui est entré tout à l’heure vient de ressortir de l’Isara avec un seul de ses hommes.
- Elémentaire, mon cher Mathias : les trois autres sont ici, plutôt trop morts pour se carapater.
- Ce qui est inquiétant, c’est qu’avant de s’enfuir, il s’est dirigé vers une fourgonnette et une voiture stationnées pas loin. Une dizaine de lascars en sont sortis, visiblement armés, et ils sont à présent dans l’enceinte de l’école.
- Merci du tuyau ! Laisse-nous nous démerder avec les truands, et suis le nain si c’est encore possible. Je te rappelle quand on est sorti du bourbier.
Je raccroche (si j’avais le sens du rythme, je ra-triolet-noire-double-crocherais !).
- Les gars, avez-vous croisé un nain en costard rital et son porte-flingue en arrivant jusque là ? demandé-je.
- Méga-tif, assure le gros. On a du les croasser : c’t’un vrai casse-dalle pour trouver son ch’min dans c’te turne.
- On est passé par un petit escalier secondaire en s'oirentant au bruit de la fusillade, ajoute Jéjé.
- On va jouer cassos par ce petit escalier sans attendre, mes drôles. Les spaghettis donnent l’assaut !
- Si les spaghettis donnent la sauce, pourquoi qu’on s’casse ? demande Béru.
Faisant fi de cette ultime remarque, nous faisons feu des deux fuseaux en direction du passage discret empruntés par mes fidèles (ils l’ont rendu après : la preuve, il est toujours là). Comme je m’y attendais, nous n’y croisons pas les malabars de Pozzi, qui ont probablement choisi la voie de leur maître pour grimper jusqu'au foyer.
Tout se goupil bien, comme dirait mon pote le renard ! Nous serons bientôt hors du guépier. Restera plus qu’à suivre la piste de Mathias pour coincer Pozzi. On le choppe, on le travaille deux minutes pour qu’il nous dise où est l’héro, on le fout au trou pour 200 ans. Ainsi, tous les malfrats de l’histoire mis hors d’état de nuire (pas ceux de l'Histoire, en revanche : que voulez-vous, je ne peux pas être tout le temps à la fois !).
- Eloi ! m’écrié-je soudain au moment où nous arrivons au rez-de-chaussée. On a oublié Joss Leton là-haut !
- Ah tiens, oui, merde ! Mais attends : il est pas mort ?
- Il a perdu connaissance après avoir pris une bastos dans la guibole. Mais il était vivant. Faut aller le chercher, sinon il va se faire ramasser par les gorilles de Pozzi.
- Trop tard, Grand ! s’exclame Jéjé.
- On a d’jà la patrouille su’l’derche ! ajoute Béru. T’entends pas ?
Clairement, on perçoit en effet le bruit d’une cavalcade au dessus de nous.
- Tant pis pour le chimiste, alors ! je peste. On trace droit vers la sortie.
- Pas la peine de s‘refaire un duel à OK Chorale, confirme le Gros. Faut mett’ la gomme recta !
- C’est bouché par devant aussi ! bêle Pinuche, qui vient de passer la tête dans le grand hall.
Je risque un œil, à mon tour (c'est relativement peu : Pozzi, lui, risque perpett'). Trois hommes de Pozzi sont restés en couverture car après tout les malfrats aussi peuvent avoir froid. Ils matent dans une direction qui n’est pas la notre (chacun sa direction, quoi, merde !) : en les bombardant simultanément tous les quatre, on devrait pouvoir se dégager un passage jusqu’à la sortie.
Las ! Au moment où je m’apprête à haranguer les autres, La Pine s’étale bruyamment et de tout son long en direction du hall. Cherchant probablement à débusquer une issue, Pinuche s’est avancé un peu avant de se prendre les pieds dans la doublure de son pantalon.
Naturellement, les trois porte-flingues postés dans l’entrée se muent en utilise-flingues instantanément. Au-dessus de nous, la cadence des foulées s’est sensiblement accélérée.
- Bougre de truffe ! m’emporté-je en tirant la Pine à l'abris. Quand on ne tient pas debout, on rampe !
- Ce pantalon n’est pas à moi, gémit la Baderne. Je l’ai pris aux brigands dont nous avons pris la place tout à l’heure, qui avait de bien plus gros mollets…
- Nous v’là beaux, les gars, pris z’entre deux feutres ! s’écrit l’Immonde.
Va encore falloir trouver un Deus et une ex-machina, j’ai l’impression !
[1] Sans doute fallait-il lire "T’étais censé être bloqué à la maison poupoule jusqu’à ton conseil de discipline, Grosse Pomme ! Tu risque gros !"
Signé : l'Editeur
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